Local Gestures
because the personal is cultural
Israeli choreographer Arkadi Zaides is that mirror in Archive, a demanding but necessary performance presented by Festival TransAmériques. Zaides took a series of video images from B’tselem, an Israeli center for human rights in the occupied territories, only selecting excerpts featuring Israeli men, no doubt to avoid speaking for or against the Other.
Zaides pauses the video, espouses the position of one of its protagonists, spins it 180 degrees, mirrors it, flips it by 90 degrees, leaning against the floor to give us the view of the top of his head, like the one the camera gives us by hovering above the protagonist. Archive is challenging because of its subject matter and its clinical approach, the live dance performance being overshadowed by the video images. When it does work, it’s because of the confrontational attitude that necessarily emerges given the source material, as Zaides walks towards us with aggression in his eyes (the audience is visible throughout the show as the house lights, though dim, remain on) before switching to the movement of a man waving his arms around to try to scare sheep away. Before us, humans become animals that need to be displaced. Zaides often returns to this movement. Archive is at its most powerful near the end, when Zaides replicates the vocalizations of the men in the videos into a microphone, looping them, building a soundtrack that is increasingly oppressive and violent. It’s hard to bear even for a few minutes. Imagine for hours, for weeks, for years… May 24-26 at 7pm Place des Arts – Cinquième Salle www.fta.qc.ca 514.844.3822 Tickets: 39$ / 30 years old and under: 33$
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Things could have gone down a more simplistic road as, at first, Gutierrez and his partner Mickey Mahar (a sprite-like cross between Sufjan Stevens and Pee-wee Herman) dance synchronously non-stop as percussive music is blasting over the speakers, barely taking a break as Mahar slips a “2, 3, 4” in before launching into yet another dance sequence. However, it’s when they finally stop that the show ironically progresses. The music keeps going, just as loud, but they stand still – much needed rest – holding hands.
When I was young, I used to believe that two people of the same sex holding hands was a political gesture. Then, when I had my first boyfriend, I realized that it wasn’t political but merely natural, that it happens without thinking or even realizing you’re doing it, that your hand searches for the one you love. What I’m saying is, people holding hands are fucking beautiful and Guttierez and Mahar are fucking beautiful. Slowly, their heads turn towards each other and they kiss. So we guess, anyway, since one of them has his back to us, so that they could be pulling a Will Smith in Six Degrees of Separation (but we can safely assume they’re not). And the dance starts up again, in a way that could remind one of the choreography for countless female pop singers. The movements are not difficult to execute, but they become more impressive as they accumulate, playing like a physical version of a memory game. The clarity of and work behind the movement is retroactively highlighted as the dancers switch to a different mode of performance, one that reeks of drunk clumsiness. They display the kind of behaviour where, in the moment, one might be blissfully unaware (humping a speaker, for example); it’s only once you sober up that it’s going to be embarrassing. They also fight in a way that’s more meant to annoy the other person than actually hurt them. In the spoken section, they impressively maintain their synchronicity even as they vary their speech in most comical ways. Particularly delightful is when they say, “We are the faceless, voiceless dancers. Do you want to fuck us?” Unfortunately, Age & Beauty Part 1 ends with its weakest section. Though it decidedly brings us in a different direction, Guttierez’s breaking into song doesn’t fit with the rest of the work. Instead, it feels like a performer’s fantasy, one that has the added drawback of putting Mahar in the background, where he doesn’t belong. Still, Guttierez remains a refreshing voice in queer performance and dance at large. May 23-25 Théâtre Prospero www.fta.qc.ca 514.844.3822 Tickets: 34$ / 30 years old and under: 28$ 1. Tragédie, Olivier Dubois (Danse Danse)
Avec son opus pour dix-huit danseurs nus, Dubois a abordé les grands thèmes (le passage du temps, la mortalité, la petitesse de la vie humaine, le rôle de l’art, l’humanité) en prenant son temps, en n’empruntant aucun raccourci facile, en laissant le sens émerger de lui-même. 2. Uncanny Valley Stuff, Dana Michel (Usine C) Avec Uncanny Valley Stuff, Michel a continué sa recherche entamée avec Yellow Towel, spectacle qui figure dans le top dix du magazine new-yorkais Time Out et pour lequel le prestigieux festival ImPulsTanz a créé un prix spécialement pour elle. Sa nouvelle courte pièce est toute aussi incisive mais encore plus drôle. En empilant les clichés sur les Noirs jusqu’à ce qu’ils s’entremêlent et se contredisent, Michel démontre l’absurdité de ces stéréotypes qui nous présentent une vision déformée du monde. 3. Antigone Sr.: Twenty Looks or Paris Is Burning at the Judson Church (L), Trajal Harrell (Festival TransAmériques) Antigone Sr. a probablement été le spectacle de danse qui a créé le plus de divisions cette année. On pourrait diviser le public en trois : ceux qui ont quitté la salle, ceux qui sont restés assis les bras croisés, et ceux qui se sont levés pour danser. Il n’est donc pas surprenant que le spectacle se retrouve dans mon palmarès. Il faut dire que je suis queer et que j’ai une affinité pour la danse post-moderne, ce qui me donne une double porte d’entrée sur le sujet. Pour ceux qui n’ont pas eu l’endurance nécessaire pour passer à travers ce défilé de mode DIY de deux heures, il serait bon de noter que les plus grands bals qui ont inspiré la pièce pouvaient durer jusqu’à dix heures de temps; comptez-vous chanceux! Peut-être comprenez-vous maintenant un peu mieux ce que c’est que de se sentir aliéné par la culture dominante. 4. Monsters, Angels and Aliens Are Not a Substitute for Spirituality…, Andrew Tay (OFFTA) Pour être honnête, lorsque j’ai vu la nouvelle pièce de Tay, qui vire de plus en plus dans le performance art, je me suis demandé si j’étais en train de regarder un artiste perdre la tête sur scène ou si Tay était en contrôle de son art. J’étais évidemment assez intrigué pour découvrir la réponse avec Summoning Aesthetics qu’il a ensuite présenté avec François Lalumière au Festival Phénomena. Conclusion : Tay continue dans la même veine ritualiste, sachant clairement dans quelle direction il va même s’il ne connaît pas nécessairement sa destination. J’ai admiré qu’il ait pris la décision de terminer Monsters sur une note différente de ce qu’il avait prévu pendant la représentation même. La misogynie latente qui avait l’habitude d’hanter ses pièces est disparue. Ce qui demeure est son ludisme, son humour et son ouverture aux expériences, peu importe ce qu’elles s’avèrent être. Si je me souviens bien, un spectateur avait qualifié Summoning Aesthetics « d’honnêteté perverse. » Cela me semble aussi approprié. 5. Built to Last, Meg Stuart (Festival TransAmériques) Avec Built to Last, Stuart (qui a reçu le Grand Prix de la Danse de Montréal) a abordé des thèmes similaires à ceux de Tragédie d’Olivier Dubois, mais de façon beaucoup plus théâtrale. En juxtaposant un immense mobile de notre système solaire avec une maquette d’un tyrannosaure et la danse contemporaine avec la musique classique, Stuart a démontré l’insignifiance des actions humaines et que notre seule rédemption possible se trouve dans l’art. 6. Florilège, Margie Gillis (Agora de la danse) Pour célébrer ses quarante ans de carrière, Gillis nous a offert cinq pièces de son répertoire revisitant les années 1978 à 1997. Par le fait même, elle nous a rappelé pourquoi elle est devenue une danseuse de telle renommée. L’intangible se manifeste à travers son corps, soulignant la fragilité de l’humain dans un univers chaotique. 7. Mange-moi, Andréane Leclerc (Tangente) Leclerc a utilisé la contorsion et la nudité pour aborder les relations de pouvoir entre les individus lorsque notre survie dépend des autres. Qu’elle puisse s’attaquer à de telles questions tout en offrant une des pièces les plus sensorielles de l’année démontre l’intelligence de son travail. 8. Tête-à-Tête, Stéphane Gladyszewski (Agora de la danse) Ma réaction à ma sortie de cette pièce de quinze minutes pour un seul spectateur à la fois : on doit donner à Gladyszewski tout l’argent dont il a besoin pour réaliser ses projets. Aucun autre chorégraphe n’arrive à intégrer la technologie avec autant d’adresse. Tête-à-Tête était à la fois intime, inquiétant et magique. 9. The Nutcracker, Maria Kefirova (Tangente) L’excentrique Kefirova a troqué l’écran vidéo pour des haut-parleurs et a démontré qu’elle maîtrise le son avec autant de flair que l’image. « Elle n’utilise pas le son pour meubler le silence comme le fond maints spectacles, mais pour matérialiser l’invisible, » disais-je. Difficile d’oublier la satisfaction ressentie lors de l’exutoire du tableau final, où Kefirova s’acharne à faire éclater des noix de Grenoble en morceaux en se servant de ses chaussures à talons hauts comme casse-noisette. 10. Junkyard/Paradis remix, Catherine Vidal (Usine C) J’espère avoir assez établi le fait que je suis un fan fini de Mélanie Demers pour pouvoir dire ceci (qui, je crois, n’est pas l’opinion populaire) : Junkyard/Paradis est probablement sa pièce que j’aime le moins. Lors de l’événement MAYDAY remix, où la chorégraphe a laissé des artistes remixer son travail, la metteure en scène Catherine Vidal a donné au spectacle la structure dramatique qu’il méritait avec une fin des plus jubilatoires. 11. loveloss, Michael Trent (Agora de la danse) Extrait de ma critique : « Trent n’a toujours pas peur de prendre le temps qu’il faut. De plus, il évite ici l’humour, le théâtral et le mouvement séducteur (athlétique, rapide, synchronisé), toutes ces astuces que des chorégraphes moins confiants utilisent pour que leur dance soit plus accessible. L’interprétation est sentie sans être affectée. loveloss est une œuvre touchante … » 12. Milieu de nulle part, Jean-Sébastien Lourdais (Agora de la danse) Pour la performance de l’année, celle de Sophie Corriveau, qui s’est méritée la toute première résidence de création pour interprètes offerte par l’Agora de la danse. Notons que le diffuseur s’est démarqué avec une programmation solide pour une deuxième année consécutive. “Shake that ass” began my review of Ann Van den Broek’s Co(te)lette, and so could begin my review of Marlene Monteiro Freitas’s Paraíso – Colecção privada. Except there is a notable difference between the two works: in Co(te)lette, it was three women shaking their ass; in Paraíso, it’s three men. Also, while the gaze of men could be felt everywhere in Co(te)lette, they were nowhere to be found onstage. In Paraíso, the opposite gender finds embodiment in Freitas herself, who appears as a gothic mistress of ceremony with organ music at her disposal. She wears a black cactus-like helmet that is potentially inspired by spiders and her top comes with matador-like shoulder pads. For their part, the four men that join her are shirtless. Otherwise, some show the physical characteristics of particularly virile animals, like the tail of a horse or the horns of a ram. However, wild they are not. They are her beasts and they are most well trained, doing whatever she demands on command. Movements of her arms are scored by little bells, turning her creatures into Pavlov’s dogs. While their shell is butch, their behaviour is otherwise. Their dance is spastic, nervous. They look like battery-operated toy dogs, their movement jerky, like they’ve been emptied out of their soul and are now more akin to robots. When in a particularly S&M section Freitas jams a harmonica in one man’s mouth, the other’s wide doe eyes reveal that each fears the same fate. The horse-like man uses his hands to mimic wings on his back and a horn in the middle of his forehead, turning himself into a cross between a unicorn and a Pegasus. To satisfy their mistress’s desires, they must be able to change on a dime. There is something clown-like in the way all the performers act, if clowns weren’t the worst thing in the world. One man moves his pecs to the music. She rewards her pets with food (peanuts?)… though not always. When they take a break, Freitas feasts on a chicken and even offers some to a few audience members, but none to her male dancers. Her power extends beyond the stage as she orders the sound person to raise the volume or stop the music. She even targets coughing audience members by turning her hand into a fist. Paraíso is a sexist fantasy turned on its head. The question is whose paradise, of course, since (as the subtitle implies) the concept is necessarily private, personal. It’s only ever paradise for who is in power. The show might be a bit one-note, but it’s a pretty good fucking note. The movement vocabulary is singular and the dancers' commitment to it brings an equally unique world into being. The four men leave the stage shortly before the end, leaving Freitas to hog the spotlight. I wish the choreographer had carried her premise to its ultimate end by being the only one to come back out to take a bow. June 4-6 at 9pm Agora de la danse www.fta.qc.ca 514.844.3822 / 514.842.2112 Tickets: 38$ / 30 years old and under: 33$ From March 25 to 27, dancer Anne Thériault will fill Ashlea Watkin’s shoes (and mask?) in Nicolas Cantin’s Klumzy. Here is what I had to say about the show when I saw it at Festival TransAmériques back in June. Spectacle. “Spectacle,” Ashlea Watkin repeats throughout Klumzy, as if to remind us that nothing should be taken at face value specifically because everything is face value. Or maybe it’s the opposite. Maybe it’s ironic since, as usual, show producer Nicolas Cantin does as little as he needs, giving us the opposite of the spectacle, antitheater. By saying the word, Watkin is transforming the context into content. The same could be said of Cantin’s presence onstage in this mostly-solo quasi-duo. It is as if he does not want us to forget that, while the show might be biographically about Watkin, it is his show and therefore is just as much about him. Maybe even more so. Watkin tells us that she used to be into Aerosmith, but that’s not the music Cantin plays on his laptop. When he plays punk rock, he’s the one dancing along to it, not her. By being onstage, Cantin is refusing the purity of biography. “It’s an image,” Watkin says. On a small square screen, a picture of her is projected. “It’s an image of me.” She might be talking about the picture, but she could also be talking about her live body, also mediated. “It’s me.” It is while wearing a mask of an old bald man that she is looking at her picture, creating a distance between the self and its representation at the same as she blurs the line between them. The recording of her voice has been manipulated, possibly speeded up, has a higher pitch certainly, has been chipmunked, rendered childlike. There is again a distance created between Watkin now and as a child – introducing the idea that maybe our memory should not be fully trusted – as well as a blurring between the two. That we dialogue with our selves only proves the inconsistency of said self; otherwise it would speak with a single voice. There is always something off in Cantin’s world, courtesy of aforementioned antitheater. Watkin speaks into a microphone, but she’s whispering. She’s doing so at the back of the stage, her back turned to the audience. Her microphone is on a stand, but she’s holding the stand sideways, so that it’s not resting on its legs. Wearing her mask – deceptively realistic, especially in soft light – she keeps opening her mouth slightly, as though chewing. The effect is unsettling. We know it’s a mask, and yet our mind constantly lapses into viewing it as a real face. To qualify as realistic, something has to be fake. At the end, Atkin pulls on a string to make the front legs of a chair hover slightly above the floor. This is as much magic as Cantin is willing to give us. March 25-27 at 8pm Usine C www.usine-c.com 514.521.4493 Tickets: 32$ / Students or 30 years old and under: 24$ D’après une histoire vraie, by French choreographer Christian Rizzo, is two drummers and eight dancers, a total of ten men including five with long hair and half a dozen with beards. I’m saying this because it’s the casting of my wet dreams. I’m saying this because I should have loved it. I did like it though. The show certainly has a lot of qualities going for it, most of which come from the fact that it is inspired by folk dance. As a result, D’après… avoids a lot of contemporary dance clichés. First, let’s mention how rare it is for a choreographer to know how to make men dance together. Often, contemporary dance will go straight for antagonism – drama is always the easy answer – as though it is the only way men can interact. That’s right… Even in contemporary dance we have to put up with this macho bullshit. However, here we witness interactions that are refreshingly different. Men put their arms on each other’s shoulders, hold hands, support each other, lean on each other, and invite each other to dance. The feeling of fraternity, of inclusiveness that emerges as a result makes the show most endearing. Indeed, there is something soft about D’après…, like the middle grey floor where the dance takes place or the low-key lighting that gently reveals it. There is a balance between the moments when the dancers are physically linked and the ones when they dance on their own. Both appear to be grounding experiences. The performer finds his footing as he sways from foot to foot on the beat, holding his hands behind his back, before joining his comrades. Since folk dance is usually practiced by non-professionals, there is also a switch of importance between the limbs. Édouard Lock has said that the difference between a dancer and a non-dancer is in the legs. Here, it is obvious. The steps executed by the dancers are simple and it is in their arms that most of the movement occurs. There is no showing off. Gone is the ego of the performer. This is about the pleasure of being together. Also gone is the existential crisis from contemporary dance. Folk dance is life affirming. As one dancer walks around the grey floor, standing on the outside looking in, we can feel his admiration before these dancing bodies, his desire to join them. Where Rizzo has more trouble is in the tricky transition that a community dance must undergo to become a theatrical dance. The choreographer does what he can by introducing elements of contemporary dance, like the modern set design or the variations in numbers of performers and speed of the dance, yet there is something that prevents the dance from imposing itself in our eye or in our mind. Still, let’s mention that Rizzo does a better job of it than Hofesh Shechter had with Political Mother. In the end, the best thing about the show for me was the drummers. Then again I always feel that way. May 30 & 31 at 8pm Théâtre Jean-Duceppe www.fta.qc.ca 514.844.3822 / 514.842.2112 Tickets: 48-58$ / 30 years old and under: 43-48$ Germinal d’Antoine Defoort et Halory Goerger, c’est du théâtre qui ne prend rien pour acquis, incluant le théâtre. C’est donc une genèse de la scène qui débute dans le noir et qui, comme l’autre genèse, doit d’abord faire appel à la lumière pour révéler ce monde. Outre les parallèles avec le récit biblique de la création, Germinal joue avec l’histoire de l’humanité. C’est donc ainsi que le mot écrit, projeté sur le mur du fond, précède inexplicablement la parole. Les quatre interprètes en viennent à se servir des surtitres pour dresser une liste de leurs découvertes scéniques et des concepts qui en découlent. C’est la boîte de Pandore qui s’ouvre et les concepts s’enchaînent et se multiplient jusqu’à ce qu’on n’arrive plus à y voir clair. C’est alors que les interprètes ont cette autre idée très humaine, celle de créer des catégories pour démêler tout ça. Influencés par les éléments limités à leur disposition et la découverte d’un micro sous la scène, ils décident de diviser les éléments entre ceux qui font « pocpoc » au contact avec le micro et ceux qui ne font « pas pocpoc. » Émergent alors l’absurdité de l’aspect arbitraire de la catégorisation, l’ironie qui en ressort lorsqu’on découvre que l’idée du pocpoc ne fait pas pocpoc, et la métaphore alors qu’on se rend compte que quelque chose peut faire « pocpoc dans le cœur. » En répartissant leur énumération sur une ligne chronologique, ils en viennent au moment présent, au-delà duquel l’inconnu règne. Toutefois, ils entrevoient le mot « fin » avant de rapidement rebrousser chemin. Évidemment, il est question de la fin de la pièce, mais aussi celle de la vie. Les interprètes passent donc à travers les étapes du deuil avant que Beatriz Setien, en mode acceptation/reconstruction, déclare « Je propose qu’on fasse un truc bien. » C’est alors qu’ils créent une chanson à partir de la liste de mots qu’ils ont débité tout au long du spectacle. Encore une fois – je pense à Built to Last de Meg Stuart, vu le soir précédent, et Tragédie d’Olivier Dubois – l’art est présenté comme étant la réponse appropriée face à la mortalité, la seule rédemption possible. Alors que les mots s’accumulent, on peut penser au livre-poème Alphabet d’Inger Christensen, ode à l’abondance de la vie. En passant de rien à tout, Germinal peut aussi nous rappeler le film Nothing du Canadien Vincenzo Natali, si on le faisait jouer en sens inverse. Germinal baigne dans l’humour. Les blagues sont souvent évidentes et étirées au-delà de leur élasticité. C’est un spectacle qui se veut plaisant et séducteur; et, soir de première montréalaise, il a visiblement plu à un public séduit. Personnellement, ça m’a fait apprécier de plus belle Built to Last, moins racoleur, plus admirable. 29 & 30 mai à 20h / 31 mai & 1er juin à 16h Maison Théâtre www.fta.qc.ca 514.844.3822 / 514.842.2112 Billets : 43$ / 30 ans et moins ou 65 ans et plus : 38$ Lorsque j’ai assisté au concert de Martha Wainwright au Théâtre Outremont, je ne pouvais cesser de percevoir l’événement tel qu’il était. Assis au balcon, j’étais étrangement conscient du fait que nous étions sur une gigantesque boule qui flottait dans l’espace, boule sur laquelle un bâtiment avait été érigé, bâtiment dans lequel un être humain chantait, être humain qui était observé par une centaine d’autres de son espèce. Tout ça me semblait d’une absurdité et d’une beauté totales. Cette absurdité n’est pas seulement le contexte inévitable de Built to Last de Meg Stuart, mais aussi son contenu. Au-dessus de la scène est suspendu un mobile géant de neuf planètes entourant un soleil blanc. En avant-scène git une maquette de tyrannosaure. La scène, microcosme pour la planète terre au complet, apparait comme un terrain de jeu immense où les actions humaines n’ont rien à voir avec les forces de l’univers. L’insignifiance des humains transparaît. Ils ne font que jouer; ils n’ont jamais la chance de participer aux affaires de l’univers ou même de les influencer le moindrement. La danse initiale des cinq interprètes se limite à un calcul de l’espace, aux paramètres du corps qu’ils ne peuvent jamais excéder. Ils sont confinés à l’humain. Alors, sur ce terrain de jeu démesuré, les danseurs (mais aussi les personnages qu’ils interprètent) font du théâtre. Leurs mouvements ne s’accumulent pas; ils ne font que se suivre et ils perdent leur sens aussitôt qu’ils sont exécutés. « Nous sommes motivés par l’enthousiasme, » dit l’un des interprètes. L’enthousiasme… Un sentiment vif, mais qui ne sait perdurer. « What’s in our hearts and in our souls must find a way out. » Built to Last avance au son de Stockhausen, de Beethoven, de Rachmaninov… Il y a un décalage énorme entre ces musiques dramatiques et la danse des interprètes, qui ne font pas dans la virtuosité. Ironiquement, la musique semble plus appropriée pour le mouvement des planètes que celui des humains. Notre musique est plus grande que nous. Peut-être est-ce pour cela que la musique de Beethoven aura survécu plus longtemps que Beethoven lui-même. Elle n’est pas du domaine de l’humain, mais du divin. Dans un cube blanc, les danseurs bougent comme s’ils se trouvaient en état d’apesanteur. Les quelques moments magiques offerts par Built to Last ne semblent pas parvenir de l’intérieur de l’humain, mais de sa place dans l’univers. Je le répète : nous nous trouvons sur une boule qui flotte dans l’espace. Dans Forgeries, Love and Other Matters, œuvre co-créée avec Benoît Lachambre, Stuart nous avait présenté un monde post-apocalyptique. À la manière de Charlton Heston devant la Statue de la Liberté dans Planet of the Apes, avec Built to Last, on se rend compte que ce monde est peut-être déjà le nôtre. Tout dépendant d’où notre regard se pose, le titre du spectacle peut paraître ironique ou approprié. Les planètes sont faites pour durer. Le dinosaure, non. Les humains… Ils sont des dinosaures en devenir. Nous ne sommes que de futurs fossiles. 28 & 29 mai à 20h Usine C www.fta.qc.ca 514.844.3822 / 514.842.2112 Billets : 48$ / 30 ans et mois ou 65 ans et plus : 43$ Louise Lecavalier attend aux limites de la coulisse et se prépare comme si elle allait entamer une course au coup de fusil. Évidemment, avec elle, c’est le cas. Les lumières de la salle sont encore allumées quand elle s’avance sur scène. Elle est sans peur. Si la chorégraphie est bavarde, c’est de façon surprenante plus au niveau des pieds que des mains. À petits pas rapides, elle ne demeure jamais une seconde sur place. Elle répète un mouvement une demi-douzaine de fois, d’un côté et puis de l’autre, et méthodiquement passe au suivant. Et elle se met au travail au sol, tout en conservant la même esthétique. Elle semble se permettre n’importe quel mouvement (« J’ai voulu laisser le corps dire tout ce qu’il veut dire sans le censurer, » elle dit dans le programme) pour qu'il devienne exutoire, voire exorcisme, quelque chose à expulser du corps. Ces jambes nerveuses se calment et ce sont les bras qui deviennent à leur tour bavards. Le danseur Frédéric Tavernini se joint à elle et épouse son esthétique. Malgré son imposante grandeur, il semble plus léger qu’elle. Ses pieds glissent sur le sol. Même lorsque leurs corps se rencontrent enfin, ils conservent cette esthétique convulsive. Pendant qu’il la transporte d’un côté à l’autre du plancher, elle continue de gesticuler. Ses bras ne veulent pas le laisser tranquille. La précision n’est pas dans le mouvement, mais dans la démarcation de cet esthétique bordélique. Et ils terminent au sol, plus calmes, flottants même, baignant dans une lumière bleue. Le mouvement est sorti. L’exorcisme a fait son effet. 6 & 7 juin à 20h Place des Arts – Théâtre Maisonneuve www.fta.qc.ca 514.844.3822 / 1.866.984.3822 Billets : 43-58$ / 30 ans et moins : 38-53$ One dancer climbs onstage, wipes the floor with her hand until she is down on her elbows, shaking her ass, at which point another dancer walks up the stage and begins to wipe the floor. There will be twenty-four of them, performing the same series of twenty-five movements, over and over again. This initial canon allows the audience to travel back in time all depending on which dancer their eyes rest on at any given moment. This is Boris Charmatz’s Levée des conflits. It is in one way chaotic because of the sheer number of performers; and yet it isn’t because each is so clearly doing exactly what they should be doing. And the first dancer begins to wipe the floor again, a loop is formed, and we understand: we are locked into this sequence. There is something of Canadian experimental filmmaker Michael Snow in Levée de conflits. Like in his movie Sshtoorrty, in which the same simple short story is not only overlapped but repeated at least ten times. And yet each time the viewer notices something different since human perception is such that not everything can ever be all taken in at once; which is why when people say that, after a certain point, they “got it,” you know they didn’t get it because it’s simply impossible. We can also think of his seminal film Wavelength, a 45-minute zoom across a mostly empty loft. In terms of storytelling, Wavelength is cheekily minimalist, but the celluloid is manipulated to such a degree that on a formal level it is so excessive as (again) to make viewers feel like they have always missed something. With its changes in lighting, no matter how seemingly few, the same could be said of Levée des conflits. And the variations occur. They perform the sequence while going in a circle in a space that progressively gets smaller. Time seems similarly condensed. Then they slow the movements down as they get even closer to each other. One could also be reminded of Michael Trent’s conceptual show It’s about time: 60 dances in 60 minutes, in which dancers repeated the same sequence of fifteen actions four times, each action first taking a minute, then fifteen seconds, then three minutes, then a minute again. Levée des conflits might be less playful than It’s about time, but more ambitious in scope. Then some of the dancers can be seen performing the sequence backwards, until they are all wiping the floor. And the cycle begins anew, abandoning the canon in favor of synchronicity. The choreography’s simplicity gets exposed, and yet it’s also more pleasurable. What is it about synchronicity? Is it because deep down we’re all order-loving fascists? Is it because it gives us something the universe doesn’t? The illusion of control, no matter how trivial? We exit Levée des conflits the same way we entered it, like the characters in Luis Buñuel’s The Exterminating Angel. It will have taken an hour and forty minutes to complete the cycle, but it will be with a feeling of resolution so logical that it might induce chills. I usually try to avoid saying such platitudes, but hopefully the advantage is that when I do say them you know I mean it: Levée des conflits is the best dance show that’s been presented in Montreal this past year. May 30 & 31 at 8pm Place des Arts – Théâtre Jean-Duceppe www.fta.qc.ca 514.844.3822 / 1.866.984.3822 Tickets: 48-58$ / 30 years old and under: 43-48$ |
Sylvain Verstricht
has an MA in Film Studies and works in contemporary dance. His fiction has appeared in Headlight Anthology, Cactus Heart, and Birkensnake. s.verstricht [at] gmail [dot] com Categories
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